Le Vin Blanc,
a le vent en poupe
PAR LES AUTHENTIK de PROVENCE – Anne-Cécile AUDRA
Crédit photo : Philippe Magoni
En Provence, le vin fait l’objet de toutes les attentions, comme un secret que l’on garde tant il est prisé du monde entier. Et la couleur reine c’est le Rosé. Mais rouges et blancs tirent aussi leur épingle du jeu, avec pour ce dernier, une embellie et parfois même une pénurie, depuis quelques années.
Vin frais, fin, élégant et aromatique, qui tire le meilleur de son terroir, avec un cépage roi, le Rolle, il est une pépite à déguster d’urgence, pour découvrir une autre facette de la Provence
L’autre couleur de la Provence
Si le rosé est LA couleur de la Provence sur toutes les tables du monde et dans l’imaginaire collectif, le vin blanc fait une entrée remarquée dans la cour des grands. Et les amateurs de grands vins ne s’y trompent pas. Certes avec seulement 4% de la production (contre 91% pour les rosés et 5% pour les rouges, qui ne sont pas en reste non plus !), le vin blanc demeure encore confidentiel. Mais la demande se fait ressentir et dope le moral des vignerons d’ici, qui y voient un autre potentiel à développer. Pour élargir leur palette et conquérir de nouveaux amateurs. Avec ses notes tantôt florales ou salées, d’agrumes ou de fruits blancs, sa grande diversité aromatique du Nord au Sud et sa robe très claire, le vin blanc de Provence – ou plutôt LES vins blancs de Provence – promet de belles dégustations. Certaines cuvées travaillées en fûts gagnent des arômes de miel, de fruits secs et de coing qui leur donnent une belle complexité. Et puis la technologie du froid, maîtrisée à la perfection pour les rosés, aide aussi à faire de très grands blancs.
Le Rolle, cépage roi de Provence
Avec un terroir adapté au cépage Rolle (ou Vermentino), caractéristique de la Méditerranée (il est très présent en Italie, en Sardaigne ou en Corse) et implanté depuis toujours en Provence, c’est LE cépage des blancs provençaux. Il mûrit tardivement et nécessite un climat chaud et sec pour éviter l’oïduim auquel il est sensible. Caractéristique des parfums d’agrumes, de poire, d’ananas, d’amande verte et de fenouil, il apporte de la finesse et du gras, pour des vins d’une grande qualité gustative, aromatiques et très équilibrés. Utilisé en assemblage avec d’autres cépages tels que l’ugni blanc, le sémillon, le cinsault ou encore le grenache blanc, il offre de nouvelles expériences aromatiques prometteuses. Ces dernières années, de nombreux vignerons ont senti le frémissement de la demande et ont replanté du rolle, pour préparer l’avenir. Il faut encore un peu de patience pour que la vigne donne à offrir ces grains, qui écriront c’est sûr, une nouvelle aventure au pays du rosé. Accompagnant à merveille les poissons et fruits de mers, ils feront sensation avec une oursinade ou la fameuse bouillabaisse. Associés à des mets typiquement provençaux comme des beignets de fleurs de courgettes, des artichauds en barigoule ou une délicieuse tarte aux blettes, ils vous inviteront directement au cœur de la Provence.
L’effet terroir
Comme pour les autres couleurs et les autres vignobles, le terroir, notion bien française, intraduisible dans les autres langues, est un mélange complexe entre les conditions pédoclimatiques locales, la sélection de cépages et leur assemblage et le savoir-faire des vignerons, hérité de plusieurs générations de labeur. Une alchimie qui produit des vins spécifiques à chaque micro-région, sur des sols calcaires ou schisteux au climat rude et chaud à l’intérieur des terres ou sous le vent et les embruns du littoral. Ainsi, chaque vin a son histoire, comme nulle autre pareille. Et c’est depuis toujours, ce qui fait des vignobles français en général et provençaux en particulier, leur caractère exceptionnel. La sélection parcellaire va même jusqu’à cultiver leur rareté pour des vins signature.
Cassis, terre de blancs …
Vignoble de pente, planté exclusivement sur le Cap Canaille, plus haute falaise maritime de France, il surplombe la Méditerranée et résiste aux assaut de l’urbanisation, par la volonté de quelques vignerons passionnés et opiniâtres, qui s’échinent à conserver l’un de plus beaux vignobles de Provence. Paysages de cartes postales, singularités identitaires, les vins de Cassis, pourtant vignoble de poche, sont reconnus du monde entier (80% de la production locale), racés, ronds et complexes, aux notes de fleurs blanches, protégés par une appellation depuis 1936. Et là pas de Rolle, mais cinq cépages principaux : la Marsanne et la Clairette entrant par décret depuis 2005 dans leur composition obligatoire, l’Ugni Blanc, l’un des plus vieux cépages de Provence, le Sauvignon, très floral, le Bourboulenc blanc, cépage rustique typiquement méridional donnant du moelleux et parfois même du Pascal Blanc pratiquement disparu des terres cassidéennes.
…. La Londe, Correns, Palette à découvrir.
Il faut s’aventurer ailleurs, sur d’autres terres pour découvrir la grande diversité des blancs de Provence, du littoral proche de Hyères, La Londe et Bormes-les-Mimosas, où la salinité et le mistral donnent une grande minéralité aux vins d’ici. Au centre Var, où dans le premier village BIO de France, Correns et alentours, on cultive la vigne jalousement et où la production de vin blanc est attestée depuis le Moyen-Age. Ce qui vaut à ce territoire une nouvelle mention géographique complémentaire (MGC) « Correns » à l’IGP Var. Du côté d’Aix-en-Provence, l’appellation confidentielle de Palette, propose des vins blancs gastronomiques, à la robe or pâle aux reflets verts. D’une grande complexité, ils développent des arômes floraux, d’agrumes ou de fruits à chair blanche et méritent une garde d’au moins 5 ans. A n’en pas douter, vous trouverez en vous perdant dans la colline, le vin blanc qui vous fera chavirer.
Cette couleur vous l’aurez compris est promise à un grand destin. Pour les Provençaux, la petite musique prend de l’ampleur, à tel point que les Côtes de Provence ont décidé de mettre en place une réflexion dédiée. Et tous, des grands noms de Provence (Château Roubine, Sainte-Marguerite, Berne, La Calisse, Le Jas d’Esclans, Le Pas du Cerf, l’Aumérade ou encore Sainte-Roseline…) aux domaines les plus confidentiels (Domaine des Diables à Puyloubier, Domaine Longue Tubi à Flassans-sur-Issole, Domaine des Trois Terres à Cabasse, Domaine Sainte-Marie à Bormes-les-Mimosas, Domaine de Lauzières dans les Baux-de-Provence et le Château d’Ollières dans les Côteaux Varois …) misent aussi sur le blanc. Alors impossible de tous les citer, il faut aller à leur rencontre pour partager un moment suspendu, entre le vin et son vigneron.