YOYO MAEGHT & AKI KURODA

Les chemins de l’art et de l’amitié

PAR YANET RAMIREZ @PHARE_CONTEMPORAIN

La rencontre entre Aki Kuroda et Yoyo Maeght est un récit fascinant d’art et d’amitié. Leur cheminement artistique, bien que distinct, a convergé pour former une dynamique unique qui a enrichi leur relation pendant des décennies jusqu’à ce jour.

Pour Yoyo, l’art est un héritage culturel profondément enraciné dans son quotidien, imprégnant chaque aspect de sa vie. Leur rencontre providentielle dans les rues de Saint-Germain-des-Prés a été le début d’une amitié qui a évolué au fil des années, se mêlant intimement à leur engagement artistique commun. Leur collaboration s’est étendue à travers des projets d’envergure internationale, façonnant ainsi le paysage artistique contemporain.

De son côté, pour Aki, l’art transcende les frontières culturelles et temporelles, fusionnant les influences orientales et occidentales dans une expression artistique authentique. Sa quête perpétuelle de sens à travers son travail reflète une profonde introspection sur la nature de l’homme et de la société, explorant des thèmes allant de l’intelligence artificielle aux catastrophes naturelles. Ensemble, Aki et Yoyo incarnent une vision de l’art qui dépasse les limites conventionnelles, embrassant la créativité sous toutes ses formes. Leur amitié qui dure depuis 40 années, est un tableau vivant, en perpétuelle évolution, nourri par une passion commune pour l’art et la recherche constante de nouveaux horizons.

Pour Yoyo : Pouvez-vous nous rappeler comment vous avez rencontré Aki Kuroda et comment cette rencontre a conduit à
votre première exposition commune en 1981 ?
J’avais 20 ans et je me promenais rue Saint- Benoît à Saint-Germain-des-Prés qui est mon quartier d’enfance. J’avais fréquenté l’école de la rue Saint-Benoît tout comme le fils de Marguerite Duras. Comme elle déjeunait quasiment quotidiennement en terrasse du restaurant Le Petit Saint-Benoît, un jour de 1980, je passe lui dire bonjour, à un moment, elle fait signe à un asiatique qui passait par là. C’était Aki Kuroda. Elle nous présente. Cependant, ce bref instant dans la rue n’a pas été ce qui m’a réellement permis de le connaître. À cette époque, Duras n’avait pas encore écrit L’Amant, qui est sorti un peu plus tard, donc il n’y avait pas cette forte dimension asiatique que l’on a pu retrouver par la suite. C’est surtout l’artiste Peter Klasen, qui avait vu une exposition de Aki à la Biennale de Paris, qui crée la rencontre déterminante. C’est lui qui recommande à mon père d’aller voir ses oeuvres. Àcette époque, Aki habite dans le 15ème arrondissement. J’accompagne mon père chez Aki, enfin, je ne peux pas vraiment dire chez lui, car nous arrivons plutôt une sorte de loge de concierge, très petite, au raz de la rue. Dans ce minuscule studio, impossible de prendre le recul nécessaire pour voir dans leur entièreté les tableaux. Outre les oeuvres, ce dont je me souviens c’est la beauté saisissante de Mariko, sa femme.

Pour Aki : Comment percevez-vous l’impact de votre héritage familial, notamment les influences de votre grand-oncle Jutaro Kuroda, sur votre parcours artistique ?
Jutaro Kuroda était le cousin de mon père. Ils ont habité ensemble chez mon grandpère qui était fabricant de kimonos et qui était un grand mécène d’art, il peignait et écrivait aussi. Jutaro Kuroda a été le premier à introduire le cubisme au Japon. Il avait également une carrière médicale, il a même soigné Vincent van Gogh. Jutaro a écrit l’un des premiers textes sur cet artiste, un document qui est conservé au Musée Guimet. C’était un grand artiste. Mon père aussi voulait devenir peintre, mais Jutaro lui a conseillé de ne pas poursuivre cette carrière. Finalement, mon père est devenu professeur d’économie à l’Université Dōshisha à Kyoto, la deuxième université la plus prestigieuse du Japon. Lors de ses voyages en France, mon père ramenait de nombreuses revues d’art, couvrant des sujets variés comme la danse, la peinture et autres formes artistiques. Ces publications étaient souvent très luxueuses. J’ai découvert ces revues alors que je n’avais que 3 ou 4 ans, à Kyoto. Bien sûr, à cet âge, je ne savais pas encore lire, alors je me laissais emporter par les images. C’était visuellement très captivant.

Pour Yoyo : En dehors de l’aspect artistique, comment décririez-vous votre amitié avec Aki Kuroda et comment cette relation a-telle évolué au fil des années ?
Notre amitié est, évidemment, fondée sur notre passion commune pour l’art. Notre quotidien découle automatiquement de ce que nous avons stocké, emmagasiné comme images, comme rencontres dans le monde de l’art, comme expositions ou lectures. Ma vie s’est construite autour de génies merveilleusement créatifs, des hommes d’exception : En premier, bien sûr, il y a Aimé Maeght, mon grand-père, mais aussi Miró, Prévert, Chagall, Gasiorowski ou Braque, ils ont forgé mon regard, ce sont eux qui m’ont donné l’envie d’explorer l’histoire de l’art. Ces influences artistiques constituent mon ADN. Aki partage cette relation étroite avec les surréalistes, une passion qui remonte à son enfance lorsqu’il découvrit les surréalistes à travers la revue Le Minotaure. Pour nous, il n’y a pas de frontière entre notre vie privée et notre vie dans le monde de l’art. Quant à l’évolution de notre amitié, je pense que Mariko, la femme d’Aki, joue également un rôle important. Mariko a travaillé avec moi à la galerie pendant 25 ans, Sa présence a considérablement facilité ma relation avec Aki. Elle continue d’inventorier les œuvres et de, systématiquement, les photographier. Lorsque Aki est absent, notamment lors de ses voyages au Japon, je sais que je peux compter sur elle pour m’aider à gérer l’atelier. Cela me permet de maintenir une certaine distance par rapport à l’intimité d’Aki, car j’accède à son univers à travers l’intimité que j’ai avec Mariko. Lorsque je rencontre un artiste, ce qui m’intéresse le plus, et ce qui est le plus gratifiant, c’est de rechercher comment je peux contribuer à la présentation de son oeuvre au public. J’ai un accès privilégié aux artistes et je m’efforce de rendre leur œuvre accessible à un public plus large. Sur le plan amical, Aki et moi, nous avons partagé de nombreuses expériences. Nous avons collaboré à la publication de la revue littéraire Noise, [nwaz] ou [noiz], volontairement on n’a laissé l’ambiguïté, on n’a jamais dit si on préférait une prononciation ou l’autre. Cette revue, tirée à seulement 2000 exemplaires, très grand format 38 x 28 cm, était entièrement réalisée en lithographie originale, lithos conçues par des artistes contemporains : Sol Lewitt, Sam Francis, Alberola, Garouste, Hélène Delprat, gilbert & george et tant d’autres artistes et autres créateurs, comme le compositeur de musique contemporaine, Pascal du Sapin. Noise était une idée d’Aki Kuroda et au-delà de l’idée, celui qui gérait avec nous le contenu de cette magnifique revue était un jeune passionné Didier Ottinger.


Aujourd’hui, il est aujourd’hui directeur adjoint chargé de la programmation culturelle du Centre Georges Pompidou et l’un des plus brillants commissaires d’expositions, c’est lui qui, pour le Centre Pompidou a fait l’exposition Francis Bacon et qui, pour fin 2024, prépare une immense exposition sur le Surréalisme. Aki Kuroda a découvert le Surréalisme, moi, j’ai grandi parmi les surréalistes car mon grand-père a organisé en 1947 la plus importante exposition regroupant tous les artistes du mouvement. Avec Aki, nous avons vécu dans le même quartier, puis la même rue et, finalement, nous nous sommes retrouvés dans le même immeuble. Alors que son atelier et son appartement étaient au troisième étage, j’habitais au quatrième. Dans ce petit immeuble, avec un seul appartement par étage, nos portes restaient souvent ouvertes. Avec le recul, je réalise que mes enfants passaient bien plus de temps dans l’atelier d’Aki que je ne le pensais à l’époque, non loin de là se trouvait notre imprimerie où Aki travaillait à ses gravures et lithographies originales et passait voir la création de Noise. Nos conversations ne se limitaient pas à son propre travail artistique, je lui parlais de ma stratégie pour présenter ses oeuvres et organiser ses expositions internationalement. Chaque exposition était un challenge, mais une des plus inouïes a sûrement été celle que j’ai proposée, obtenue et organisée au Beijing Art Museum of Imperial City, imaginez ! Un Japonais au centre de la Cité interdite de Pékin. Sans une confiance mutuelle, elle n’aurait pas pu se faire. Ensemble, nous avons monté des expositions partout à travers le monde : Danemark, Brésil, Espagne, Suisse Allemagne et même du temps de la Tchécoslovaquie, à Bratislava !

Avec Aki, nous avons toujours exploré des territoires que d’autres ont peut-être découverts un peu plus tard.

Yoyo Maeght

Pour Aki : Comment se déroulent concrètement vos collaborations artistiques, notamment celles impliquant des scientifiques et des astrophysiciens ?
Mon travail artistique s’inscrit dans une approche du ‘happening’, des rencontres et des événements qui surviennent de manière inattendue. Ce concept du ‘happening’ est une partie intégrante de mon travail. Mon intérêt pour l’astrophysique a commencé dans mon enfance grâce à une revue, un manga intitulé « Astro Boy », qui explorait des thèmes futuristes comme les fusées, les robots et la technologie. C’étaient des idées vraiment novatrices pour l’époque. En 1965, le fait que l’humanité ait pu voir la Terre de l’extérieur a été une véritable révolution. J’ai aussi assisté à l’avènement de la télévision, d’abord en noir et blanc puis en couleurs. Quand j’étais enfant, nous avions des disques, mais rien de comparable à ce qui existe aujourd’hui. Tout cela a influencé ma vision artistique. J’ai commencé en peignant traditionnellement à l’huile, puis tout en n’abandonnant pas les pinceaux, je me suis mis à faire des installations, le monde changeait si vite dans les années 1960. J’ai beaucoup travaillé sur des ‘happenings’, collaborant avec des artistes américains pour créer des décors de spectacles. Aujourd’hui, mon travail reste fidèle au concept du ‘happening’, que je traduis également dans mes peintures. Pour moi, toute la vie est un ‘happening’, un enchaînement de rencontres fortuites. Les astrophysiciens et les scientifiques que j’ai croisés sont le fruit du hasard.

 

Pour Yoyo : Comment décririezvous la dynamique actuelle de votre collaboration avec Aki Kuroda ?
C’est la suite logique d’une forme de modernité. Avec Aki, nous avons toujours exploré des territoires que d’autres ont peut-être découverts un peu plus tard. Nous avons notamment réalisé de très grandes performances, des événements éphémères qui demandaient parfois des mois, voire des demi-années de préparation, comme ce que nous avons fait à la Manufacture des Oeillets, ou à Aix-en-Provence, à Lyon ou au Centre Pompidou avec « Passage de l’heure bleue ». Dans tous ces projets, j’essaie d’être le producteur et le metteur en scène des envies d’Aki Kuroda. Parfois, ses performances émanent du chaos de son atelier. C’est dans ce chaos qu’il parvient à créer des oeuvres extrêmement épurées. Mon rôle consiste alors à réorganiser ce chaos pour le rendre accessible au grand public. Cela nécessite beaucoup de production, car ce n’est pas Aki qui va construire des personnages de 6, 8, ou 10 mètres de haut, organiser de la musique ou gérer le transport d’une maquette qu’Arianespace prête pour quelques jours. Il faut aussi, parfois, peindre des murs ou modifier une architecture. Nous ne nous demandons pas qui fait quoi ; les idées les plus créatives et parfois farfelues viennent d’Aki Kuroda ou de moi. Je pousse Aki à aller au-delà de sa propre créativité, car plus il crée, plus je suis heureuse. Un exemple concret est le projet des «Bunny», ces objets produits en grande série. Ils sont la suite logique des décors du ballet Parade que le chorégraphe Angelin Preljocaj a repris. Après Picasso, qui fit les premiers décors, la mission de créer des décors contemporains a été confiée à Aki. Les «Bunny» et «Cosmo Bunny» sont issus de divers décors et ensembles créés par Aki, ils sont conçus comme des objets d’art accessibles au grand public. La seule véritable difficulté a été de trouver comment produire ces objets à grande échelle dans une qualité «oeuvre d’art».

Pour Aki : Pouvez-vous partager une réflexion sur la façon dont la notion de passage entre les cultures orientales et occidentales se manifeste dans votre création artistique contemporaine ?
L’art européen a été introduit au Japon il y a longtemps, mais l’influence japonaise a également toujours été très forte en France. Même Cézanne et Van Gogh, parmi tant d’autres artistes de l’époque, ont été inspirés par le Japon. Il y a toujours eu des échanges entre l’Orient et l’Occident. Certains essaient de séparer les deux, mais ce n’est pas possible. Mon travail artistique reflète cette fusion des influences ; il n’est ni strictement occidental ni purement oriental, il est les deux à la fois. Mon art est influencé non seulement par certains artistes de l’époque, mais aussi par des éléments comme la guerre et la technologie. Dans les années 1980, un conservateur japonais en France m’a demandé pourquoi je ne produisais pas d’art « japonais ». Sa question m’a choqué et cette incompréhension persiste. Récemment, j’ai organisé une visite privée de mon atelier pour un groupe de Français qui m’ont demandé pourquoi les textes que j’écris sur mes toiles ne sont pas en japonais, mais en français ou en anglais. Pour moi, c’est plus naturel d’utiliser ces langues, car je cherche toujours à comprendre ce qu’est réellement la peinture. Il n’y a pas de réponse simple à cette question.

On avait posé la question suivante à Picasso : Combien de temps vous a-t-il fallu pour peindre ce tableau ? Et il avait répondu : Le penser 50 ans, le réaliser une journée

Yoyo Maeght

Pour Yoyo : Pouvez-vous partager des détails sur les expositions récentes d’Aki Kuroda et comment son art continue d’évoluer ?
Je n’aime pas le mot «évoluer», parce qu’il implique que l’étape précédente est inférieure à la suivante, comme dans l’évolution de l’homme. Moi, je n’ai pas envie de retourner à l’époque de Cro-Magnon. Je préfère parler de déploiement ou de construction d’une oeuvre. Dans l’art d’Aki Kuroda, chaque nouvelle pièce a sa propre force et n’a rien perdu en intensité par rapport aux oeuvres précédentes. Je dirais qu’elle se déploie dans de nouveaux territoires. Ce que j’adore chez Kuroda, c’est l’incroyable inventivité, la créativité et l’ampleur de son univers qui ne cesse de s’étendre. Je suis toujours surprise par son imagination, par la diversité de ses créations. En fait, je défends l’artiste autant que l’oeuvre elle-même, ce qui est un peu comme ce que faisait mon grand-père. Au lieu de défendre uniquement des peintures ou des sculptures, je défends l’artiste et tout ce qu’il représente. C’est pourquoi tout ce que fait Aki Kuroda m’intéresse, car c’est lui que je souhaite soutenir et accompagner. Mon rôle est de trouver des moyens de présenter son travail au public de manière accessible, sans pour autant sacrifier la profondeur ou la complexité de ses idées.

Pour Aki : Quels sont vos projets artistiques futurs et les thèmes que vous envisagez d’explorer dans vos prochaines 
créations ?
Je ne connais pas le futur, personne ne le connaît vraiment. Nous sommes entrés dans l’ère de l’intelligence artificielle, qui est dix mille fois plus puissante que le cerveau humain. Dans 20 à 30 ans, cela pourrait prendre une ampleur bien plus grande. Imaginez l’homme d’aujourd’hui comme étant l’équivalent du gorille d’hier et la machine prenant le rôle de l’homme de demain. Ainsi, dans le contexte de l’intelligence artificielle, l’homme d’aujourd’hui prend la position d’un gorille, tandis que la technologie prend celle de l’homme. Cette situation pourrait empirer, avec le risque de régresser symboliquement jusqu’à l’état de «poisson rouge». Le développement de l’intelligence artificielle à venir est donc colossal. D’un autre côté, les événements au Japon, comme les tremblements de terre, les tsunamis, soulèvent des questions inquiétantes. Les scientifiques prévoient des séismes encore plus dévastateurs à l’avenir. Ajoutez à cela les risques liés aux sites nucléaires, ce qui a déjà conduit à la destruction de villages entiers. Le réveil récent d’un volcan au Japon ne fait qu’accroître les inquiétudes. Revenons à la question de base : «Qu’est-ce que l’homme ?» C’est une question très ancienne qui revient toujours. En même temps, «Pourquoi peindre ?» interroge l’importance de l’art. Ces questions sont fascinantes car je suis en quête de comprendre ce qu’est l’homme. Est-ce une illusion ? Le monde est-il une illusion ? On dit que tout n’est qu’illusion, mais en même temps, nous ressentons des émotions, la douleur par exemple. Ces interrogations, qui me hantent constamment, sont le moteur de mes projets artistiques à venir.

Pour Yoyo : Y a-t-il des projets futurs ou des ambitions artistiques communes que vous envisagez d’explorer avec Aki Kuroda ?
Oui, il y a toujours de nouveaux territoires à explorer. Nous avons travaillé sur des vidéos qui pouvaient devenir des NFT. Il ne faut pas oublier qu’en l’an 2000, il y a plus de 20 ans, Aki a réalisé une exposition entièrement virtuelle. Cette exposition a été reproduite dans un livre que j’ai coédité avec des partenaires japonais, un ouvrage de plus de 700 pages. Les gens pensent qu’il s’agit d’une exposition physique dans un musée, avec une scénographie particulière. En réalité, tout était immatériel, virtuel. Et c’était en 2000, plus de 20 ans plus tard, ces idées continuent de repousser les limites. Aki est toujours animé par de nouvelles idées et travaille même avec des scientifiques, ce qui l’amène à créer des œuvres artistiques véritablement novatrices. J’attends toujours d’être surprise et ma surprise est toujours ailleurs que là où je l’attendais.

YOYO MAEGHT & AKI KURODA

Portrait chinois

Le lieu idéal pour exposer l’art ensemble serait…
Yoyo : Ça pourrait être sur la Lune, sous l’océan, ça pourrait être, au contraire, dans une chose toute petite, dans une main, dans une poche. Imaginez un fume-cigarette avec une exposition dedans. Imaginez une chose immatérielle, presque une vapeur d’exposition qui se diffuse dans le ciel. Ça pourrait être une chose parlée, chantée ou immatérielle. Je reste issue des dadaïstes. Je n’ai pas besoin du tableau et du châssis, même si une grande part de l’oeuvre de Aki Kuroda c’est de la peinture sur châssis. Et moi, j’adore que ce soit relativement conventionnel, c’est la pensée qui doit être contemporaine, ce n’est pas le support.

Aki : Un grand espace, un musée, une ancienne usine, un endroit où il y ait des murs. Je n’aime pas quand la peinture flotte dans l’espace.

Si l’amitié était un tableau, ça serait…
Yoyo : Celui qui doit être peint demain, parce que l’amitié d’aujourd’hui n’est peut-être pas celle de demain. Vous savez, ces fameuses médailles : c’est quoi la médaille de l’amour ? Je t’aime plus qu’hier, moins que demain. Notre amitié est plus qu’hier et sans doute moins que demain. C’est le tableau qui reste à peindre un jour.

Aki : Dans ma peinture j’ai essayé de mettre des messages comme happy boy, hope, ce qui représente pour moi l’amitié. Je pense que rencontrer un vrai ami c’est très compliqué, parce qu’il y a toujours un mur de mots qu’il faut analyser. Les gens n’arrivent pas toujours à rentrer à l’intérieur de la peinture. Souvent on s’arrête sur des étiquettes.

Le mot qui décrit le mieux notre collaboration artistique est…
Yoyo : Allons-y !!!

Aki : Rencontre

En un mot, votre source d’inspiration commune est…
Yoyo : La vie.

Aki : Il y a plein de mots. Des centaines de mots. Ma pensée c’est le « octopus thinking ». Je me balade dans la rue et je cherche le passage, donc je suis tout le temps en mouvement. Peut-être que le mot d’aujourd’hui serait dynamique.

Si la créativité était une couleur, elle serait…
Yoyo : Non, elle n’a pas de couleur, au même titre que l’océan n’a pas de couleur. L’océan est bleu, vert, jaune, rouge. Le ciel est bleu, vert, jaune, rouge. Vous vous rendez compte que le ciel est capable de passer du bleu le plus profond au flamboyant, orange. C’est comme si on disait : quelle est la couleur du ciel ? Non, elle n’a pas de couleur, elle est de toutes les couleurs.

Aki : Il n’a pas souhaité répondre

Le meilleur moment pour créer de l’art est…
Yoyo : Fabriquer ou créer ? ce n’est pas pareil. Créer, c’est tout le temps, H24, y compris dans le sommeil, y compris en mangeant, y compris en marchant. Fabrication c’est quand elle devient nécessaire. Vous avez des artistes, ce qui est le cas d’Aki Kuroda, qui rentrent dans leur atelier et qui ne touchent pas un pinceau et qui vont s’asseoir et pendant des heures, ils vont peut-être regarder leurs tableaux. Est-ce que pendant les heures où ils regardent leurs tableaux sans toucher le pinceau, est-ce qu’ils ne sont pas déjà en phase de création ? Oui.

A la question : Combien de temps vous a-t-il fallu pour peindre ce tableau ? Picasso avait répondu : Le penser 50 ans, le réaliser une journée.
Aki : Il n’y a pas de meilleur moment, ça arrive d’un coup.

En un mot, notre lien avec l’art est…
Yoyo : L’art. !!!!!

Aki : C’est ma vie !!!!