« Terra Rossa »

Terre cuite made in Provence

par Isabelle DERT

Très tendance, la terre cuite revient sur le devant de la scène. Longtemps passée de mode, remplacée par le tout plastique et le béton, la céramique se débarrasse de son étiquette babacool des années 70. Cette période troublée nous pousse vers un retour aux sources, choisir le « made in d’ici » artisanal plutôt que le « made in là-bas » industriel ! Valorisant le savoir-faire manuel des créateurs et artisans, le public veut du circuit-court, des matériaux racontant une histoire, et ayant du sens, à la fois fragile, intemporel, unique. Ecologique et ancestrale, la terre cuite s’inscrit dans ce mouvement de la slow consommation consciente de notre époque. Elle exige qu’on prenne son temps. Et le résultat nous touche par le charme de sa parfaite imperfection. L’eau, le bois, le feu, la terre, la fusion de ces quatre éléments inspire l’être humain depuis la nuit des temps. A travers la rétrospective « Les flammes, l’âge de la céramique », le Musée d’Art moderne de Paris la met à l’honneur en 2021, quant au superbe « Terra Rossa » de Salernes (Var), il lui est entièrement dédié. Sa côte est en hausse et les galeries d’art aussi lui font du pied. La Provence est l’un des berceaux de la céramique occidentale. Entre tomettes, poterie et arts décoratifs, de Salernes à Aubagne, artisans et artistes perpétuent un savoir-faire séculaire. Ils ne cessent de se réinventer et font rayonner leur travail à l’international. Plongeons les mains dans la terre…

Le long travail de la terre

L’argile a besoin de longs mois de préparation avant d’être façonnée. Après avoir été récoltée, elle est brassée avec de l’eau dans un délavoir pour obtenir de la barbotine. Filtrée et débarrassée de toutes ses impuretés, elle est entreposée dans des pastières où l’eau va s’évaporer lentement. Elle va ensuite reposer plusieurs mois dans des masses (caves) où l’argile devient plus élastique et malléable pour les artisans qui vont la façonner. Une fois formés, carreaux et créations sèchent plusieurs semaines avant une première cuisson. Une étape cruciale pour un séchage homogène, ce qui évite notamment aux coins des carreaux de se corner en séchant plus vite que le centre. L’invention de la tomette hexagonale a d’ailleurs permis de limiter les tensions à ce stade de fabrication. A leur sortie du four, certaines céramiques, aussi appelés biscuits, vont recevoir de l’émail et retourner au four pour autant de cuissons que de couleurs nécessaires à la création de l’artiste. C’est cette dernière étape qui les vitrifie et révèle la couleur. Les autres restent dans leur beauté brute. Chaque carreau, chaque tomette et objets issus de l’argile et de l’imagination de celles et ceux qui ont plongé les mains dans cette riche terre de Provence, sont uniques, vivants et racontent une histoire. Une histoire que chacun d’entre nous prolonge chez soi.

Salernes, la terra rossa

Entre tomettes, poterie et arts décoratifs, les artisans et artistes salernois pérennisent leur savoir-faire ancestral grâce à un vivier quasiment inépuisable d’argile rouge très riche en fer. Génération après génération, ils façonnent cette terre pailletée très résistante et ne cessent de se réinventer. Quelques-unes des premières céramiques européennes découvertes à Salernes par André Taxil remontent à 7000 ans avant Jésus Christ. Au début du XXème siècle on y recensait 53 fabriques de carreaux et tomettes. De New York aux sables du désert, les créations salernoises habillent murs et sols du monde entier. Ses nombreuses propriétés répondent aux exigences contemporaines et environnementales. C’est un isolant thermique performant et un antifongique empêchant le développement des moisissures responsables de nombreuses allergies respiratoires. Prochaine étape, la cosmétique ! Les propriétés curatives de l’argile ne sont plus à démontrer. Des études sont en cours sur l’utilisation de celle de Salernes dans la cosmétique. Mais avec ses pigments intenses, je ne la recommanderais pas en masque sur le visage, à moins de vouloir lancer le rouge comme nouvel autobronzant !

Groupe ICV* Provence
*Institut Coopératif du Vin

86 chemin du Plan
83170 BRIGNOLES
Tél. : 04 94 37 01 90
www.icv.fr

Facebook : Musée Terra Rossa
www.terrarossasalernes.fr

Histoire de la terre sur Terre…

Vénus, animaux et autres objets en terre cuite font leur apparition au Paléolithique Supérieur (45000 – 10000 avant J.C) et se développent avec la sédentarisation humaine au Néolithique (9000 – 3300 avant J.C). Si elle est l’un des plus anciens matériaux artificiels de construction, la terre cuite a d’abord été utilisée pour la confection des ustensiles de la vie quotidienne, d’objets cultuels, de sculptures et poteries. Très résistant, ce matériau était généralisé dans tout le Proche Orient, avant de faire son apparition chez nous 5000 ans avant JC.

L'armée du Mausolée de l'empereur Qin

Inscrit au Patrimoine Mondial de L’Humanité, l’armée du Mausolée de l’empereur Qin est une des oeuvres en terre cuite les plus connues. Composée de 8000 statues de soldats en armures grandeur nature accompagnés de leurs chevaux, elle date du IIIe ou IIe siècle avant J.C. Découverte en 1974, ces sujets polychromes ont été cuits à 900 degrés, une température qui lui a permis de traverser les âges sans une ride. Car, plus la température de cuisson est élevée, plus la terre est résistante.

La Terre cuite de Salernes, sous toutes ses formes, en Tomette, avec des messages personnalisés gravés, sur mesure, en sardine, en vase, en forme de coeur, en bouton de porte nature ou émaillée, bref sous toutes ses coutures !!

Marie Sophie Maury jeune créatrice borméenne nous en fait voir de toutes les couleurs avec la terre de Salernes qu’elle façonne de sa main de femme.

www.marie-sophie-maury.com
instagram : marie_sophie_maury